La plus Grande image numérique du monde. 1655 photos de 21 mégapixels assemblées pour composer un panorama incroyable de précision. Il aura fallu 96 heures à un ordinateur muni de 16 processeurs et de 48 GO de mémoire vive pour assembler ce chef d’œuvre.
vous pouvez visualiser cette image à l'adresse suivante :
".: Actuellement la définition d’une image photographique se
traduit en un nombre de pixels ou de dpi... La précision du médium se veut
technique, je préfère apprécier d’un point de vue sémiologique. Ce travail des
«petites définitions» utilise «la qualité moindre» des téléphones portables des
premières générations en relation à la tradition du portrait en peinture.
Les sujets sont «illuminés» avec un écran d’ordinateur, donc les moyens d’une
nouvelle technologie pour un rendu d’image qui fait référence aux portraits de
la Renaissance par la posture des sujets et la lumière directionnelle. L’autre
référence à la peinture se traduit par le pixel agrandi (et conservé
carré) qui ressemble à une «touche» de peinture; indéfinissable de prés, le
sujet se recompose de loin. La perturbation du signal, le bruit de l’image diminue la lisibilité du sujet et renvoie au médium. Cette technologie numérique nous
donne une vision peu réaliste du monde par la dégradation due à la
technologie rudimentaire de l’objet et nous renvoie
à une image du monde beaucoup plus abstraite que prévu. L’esthétique de
cette mauvaise définition est pour moi une excellente opportunité de
questionner le médium et notre relation au réalisme des images. Le téléphone
portable est censé nous donner la possibilité d’enregistrer facilement les
petites et la Grande Histoire (si par hasard on a été là ), elle nous en
donne en fait une vision dégradée. J’utilise son esthétique Pictorialiste et le
peu de précision des images pour sublimer mes sujets et combler le manque de
définition par l’imagination et les références à l’histoire de la
représentation."
Ce travail est directement daté par une étape de la
technologie qui devient déjà obsolète, en effet la nouvelle génération de
portable est de bien meilleure qualité et les fichiers s'approchent de la
qualité des appareils photographiques, la définition du monde semble donc plus réaliste.
Voir notre article sur ce blog : "Nos œuvres numériques sont-elles immortelles ?"
A Versailles, l’art contemporain n’a pas sa place. Deux ans après la polémique autour de l’exposition des oeuvres de Jeff Koons, le scénario semble vouloir se répéter à l’ouverture de l’exposition de l’artiste japonais Takashi Murakami. Du 14 septembre au 12 décembre 2010, cet artiste installe 22 œuvres inspirées par les mangas dans les appartements royaux du Château. C'est l'autorité culturelle du Qatar qui finance quasi intégralement l'exposition, avec pour projet de montrer l'ensemble à Doha à l'horizon 2012. Mais c'est l'artiste lui-même qui finance la production des nouvelles pièces, qui sont donc à vendre……. Organisateur en 2000, à titre de commissaire, d'une exposition d'art japonais ironiquement dénommée "Superflat" (superplat), Murakami y montrait les imageries et stéréotypes caractéristiques des loisirs de masse de la société japonaise. Ce qui ne l'empêche pas d'œuvrer lui-même dans ce domaine et de collaborer avec des designers et des publicitaires.
T. Murakami « A l'inverse de ce que vous pensez peut-être, je ne suis pas très connu au Japon comme artiste mais plus comme commentateur en matière d'art. On me voit assez souvent à la télé. J'anime une émission à la radio. Mais je n'ai jamais été très bien accepté dans mon pays en tant qu'artiste. Or, cette fois, la nouvelle de cette exposition s'est répandue partout et très rapidement. »
Les réactions :
Pour le président de l’établissement «Château de Versailles», Jean-Jacques Aillagon (ex-ministre de la Culture du gouvernement Sarkosy), ces protestations «émanent de cercles d’extrême-droite intégristes et de cercles très conservateurs». Ils voudraient faire de Versailles «un reliquaire de la nostalgie de la France de l’Ancien Régime, d’une France
repliée sur elle-même et hostile à la modernité ». Cette argumentation, très réductrice, utilise l’épouvantail de l’extrême droite pour mettre tous les opposants dans le même sac.
Si nous suivons les très nombreux commentaires des Internautes aux articles consacrés à cette exposition, nous nous apercevons que les réactions sont beaucoup plus nuancées et portent surtout sur la médiatisation publicitaire de cette exposition à des fins de promotion d’un artiste peu reconnu.
« Notre réaction est la mise en cause d’une démarche qui s’apparente à celles des publicitaires qui est d’insérer un message auprès d’un public qui ne peut y échapper. Comme il y a des intérêts économiques en jeu, les suspicions de collusion sont inévitables. On ne supporterait pas qu’une marque fasse sa publicité dans les jardins ou les appartements de Versailles, on ne doit pas accepter qu’un artiste à la recherche de la célébrité fasse sa pub dans ce lieu historique »
« La meilleure approche c'est de savoir à quoi s'en tenir: du « design hype », parfois inventif certes et dans un style personnel, mais rien qui ne puisse se comparer à des œuvres intemporelles, et encore moins des œuvres porteuses de sens. C'est le vide total au sens littéral, la forme sans aucun fond. Dans 2 ans on aura totalement oublié, l'indifférence sera complète. Il ne sert donc à rien de s'exciter pour ou contre: les organisateurs se croient modernes et originaux, ils sont juste ringards. »
Mais beaucoup d’autres Internautes pointent ou dénoncent l’absence de contenu des œuvres :
« Il n'y a plus de passé qui enracine, de présent à partager ou d'avenir qui mobilise. Il ne reste que la consommation de masse
comme modèle général. »
Jean-François RAUZIER réalise des "hyperphotos", c'est-à-dire des images fabriquées sur ordinateur à partir de centaines de clichés pris sous tous les angles et au téléobjectif. "Aucun objectif ne peut fournir, en une seule prise, cette netteté que j'obtiens en assemblant 200 photos".
La quête de Rauzier ? Faire rêver avant tout comme il a rêvé ces mondes surnaturels, fantastiques et baroques, et aussi "voir à la fois plus large et plus près, arrêter le temps et pouvoir examiner tous les détails de l'image figée". En d'autres termes, réaliser, en même temps, un panoramique à 180 degrés et un zoom ultra serré, pour mettre en avant ce qui échappe à l'œil, à la conscience, à la raison.
Entre rêve et réalité, les photos d'ARTEFACT invitent à contempler la
vie à travers le temps qui passe. Le temps qui casse. Clichés à la fois dramatiques et poétiques où les gens et les choses sont appréhendés comme des fragments du temps.
Tout le monde (ou presque) connaît Duane Hanson (1925-1996), un sculpteur hyperréaliste américain (classé à tort parmi les artistes du Pop Art) qui s'intéresse avant tout aux gens ordinaires et à leurs existences tout aussi ordinaires.
La thématique Hanson a d'abord commencé, dans les années 1960, à mettre son talent descriptif au service d'œuvres clairement « engagées » en multipliant les scènes de violence urbaine ou raciste; voire d'accidents de la circulation. Mais, abandonnant progressivement cette espèce de « journalisme plasticien », il s'est mis à privilégier les vieilles dames assises sur une chaise, les couples de touristes à chemise bariolée ou les flics sudistes à la méchanceté caricaturale (de son propre aveu). Non qu'il ait cessé d'être révolté par l'injustice et les défauts du « système », mais plutôt qu'il ait eu envie de se consacrer à ce qu'il y a de meilleur en l'homme ― laissant à d'autres le soin d'en explorer la part d'ombre.
La dimension politique de son travail n'en reste pas moins évidente, mais passe au second plan derrière la puissance poétique des personnages grandeur nature que l'on ne peut s'empêcher de croire prêts à s'animer et à vous faire la conversation…
« Mes images ne sont pas plus que ce que vous voyez dans la vie réelle. Le monde est tellement remarquable, inouï, surprenant, qu'il n'est nul besoin de forcer le trait. Ce qui existe autour de nous est simplement confondant » Duane Hanson.
La technique Dans le cas de Duane Hanson, comme chez ses contemporains Georges Segal, John de Andrea ou l'anglais John Davies, la méthode utilisée est celle du moulage du corps humain et non celle du modelage. Ces techniques sont deux modes d'appréhension du réel extrêmement différents, même si le résultat peut sembler proche. Contrairement au modelage, le moulage du corps était initialement une technique funéraire. Dans l’art contemporain, elle est devenue un équivalent de la photographie : fixer de manière « vraie » et « authentique » le présent.
► Exposition Duane Hanson, pavillon Paul DELOUVRIER / Parc de la Villette / Paris XIXe - jusqu'au 15 août – exposition gratuite - entrée libre.
Pour connaitre les principales agences de reportages et suivre les photojournalistes dans leurs pérégrinations à travers le monde, il existe un blog passionnant : celui de Alain Jacquet, étudiant au Centre de Formation des Journalistes.
Abandonnés dans la rue ou adoptés en galerie, ces sculptures
de bébés en résine, réalisées par l’artiste plasticienne Prune questionnent la
frontière entre humain et animal. Hybrides génétiques mixant le chiot et l’enfant,
les bébés domestiques représentent les chimères de demain.
La question de la frontière entre l’Homme et l’Animal est
fondamentale. A chaque époque, l’Homme a tenté d’y répondre par
l’imaginaire : des êtres hybrides peuplent les mythes grecs, les fresques
égyptiennes, les contes bibliques et plus proches de nous la bande dessinée ou
le cinéma fantastique. Aujourd’hui avec les avancées de la science et certains phénomènes
de société, la réalité rattrape la fiction, l’imaginaire se réalise.
La société fabrique des hybrides : les animaux
domestiques. Au-delà des clivages culturels et politiques un phénomène
sociologique grandissant : l’humanisation des animaux domestiques. Les
chiens sont de plus en plus considérés comme des enfants et génèrent un nouveau
marché de consommation (mode, hôtels, loisirs, cabinet de psychanalyste, crèches,
etc.)
La science fabrique des hybrides : les manipulations
génétiques. L’hybride est au cœur des recherches des scientifiques et des
industriels. En Angleterre, il est crée des embryons hybrides
mi-homme/mi-animal à des fins thérapeutiques. A travers le monde, la recherche
génétique sur l’hybride se développe. Pour avancer dans la recherche sur les
xénogreffes (greffe d’organe animal sur l’homme) on injecte des gènes humains spécifiques
sur des porcs élevés pour leurs organes.
Si créer
c'est subvertir une lumière à une autre, c'est considérer le réel sous
un autre angle que celui de l'attendu, si cette subversion est
nécessaire en tous instants, jonglerie entre le code et le jeu sur le
code, il faut trouver une place pour cela, respecter l'irrespect
attendu, concilier le rôle de chacun dans ce théâtre là.
La subversion est nécessaire à l'art, et celui ci ne
s'accomplit aussi que par celle là. On pourrait même dire que c'est son
moteur et la source de la jouissance qu'il procure. C'est la subversion
des codes dans leur utilisation intrinsèque, qui dégoupille la grenade
dans le temps même où elle pose un statu quo.
A l’ère du corps formaté et du visage botoxé, la photographe Valérie Belin dresse tour à tour des portraits de référence qui peuplent les magazines de papier glacé. Elle pousse l’art de l’esthétique dans ses retranchements à travers des séries où les visages et les bustes capturés sur fond noir tiennent davantage des spectres ou des robots que des êtres humains. Valérie Belin questionne la morphologie et les codes de représentations véhiculés par les médias. Les séries réalisées en couleur suite à une sélection des modèles sur catalogue d’agences de mannequins, placent le spectateur dans une situation de joueur. A lui revient le rôle de décrypter la supercherie du réel présent dans chaque visage à la beauté plastifiée. Les portraits, divisés à part égale entre masculin et féminin ignorent le spectateur de leurs yeux creux et vitreux. Des femmes aux bustes nus et immaculés et aux regards errants laissent deviner une fausse humanité, celle-là même rencontrée dans les vitrines de prêt-à-porter. L’ambivalence du mot mannequin est ici exploitée à juste titre, puisque les identités lisses et impersonnelles cèdent leur place au mannequin de plastique, comme l'aveu d’échec de notre incapacité à différencier modèle artificiel et être humain.
Le clip emprunte avant tout au cinéma : en 1929 déjà, un cinéaste de Moscou Dziga VERTOV vantait la technique du montage qu'il comparait à une "re/création" artistique du réel. Dans son film, "L'homme à la caméra", le montage a un rôle tout à fait actif: c'est lui qui rythme tout le film. On retrouvera cette conception organisatrice du montage 50 ans plus tard dans l'art du vidéo-clip. En 1940, quand Walt Disney crée "Fantasia", il adapte le mouvement et rythme des images sur celui de la musique. En 1964, les « scopitones » envahissent les bars en France. Le principe est simple: comme dans un juke-box, on met une pièce, on choisit sa chanson, une bobine de 16 mm se met en place et on voit un film de 3 minutes environ sur le petit écran avec des vedettes. Dès 1965, l'artiste sud-coréen Nam June Paik ouvrait les voies de l’art vidéo, il qualifiait le nouveau média de "pinceau électronique". Ses premiers films en vidéo jouaient surtout sur le parasitage du signal vidéo. En 1977, naît le premier véritable clip: celui de Queen pour sa chanson "Bohemian Rhapsody". Résultat immédiat, le groupe se retrouve n°1 des Hit Parade du monde entier. C'est alors le départ du clip comme outil de promotion musicale et des artistes comme Rod Steward, les Rolling Stones et les Bee Gees se mettent également à l'utiliser En 1981 commence l'industrialisation du vidéo-clip. On reconnaît l'influence de la publicité dans l'art du vidéo-clip. Le montage "cut", haché et percutant est dicté par le rythme de la bande-son. On voit également très vite l'émergence de nouveaux trucages que le vidéo art avait déjà commencé d'expérimenter avec Nam June Paik et d'autres artistes du groupe FLUXUS. Les clips utilisèrent également des mises en scènes de plus en plus élaborées héritées du rock théâtral. Des groupes Pink Floyd et Emerson furent les premiers à insérer des morceaux de films dans leurs shows en public. Si, au début, le clip était une simple mise en image d'une chanson, il se perfectionna très vite par une multiplication des genres, d'abord les clips empruntèrent des images au cinéma, à la bande dessinée et même aux actualités puis ils utilisèrent de plus en plus d'effets spéciaux et de trucages suscitant la surprise des téléspectateurs. L'important était alors de miser sur l'impact d'une nouvelle imagerie encore inconnue du public.
Le montage vidéo-clip Le montage d'un clip consiste à mettre bout à bout les différentes séquences qui le composent. Souvent très denses, les images sont les ponctuations visuelles du rythme musical. Non seulement elles se suivent et ne se ressemblent pas, mais le passage d'une image à l'autre est souvent brusque, net, et sans transition. Les différents plans qui composent un clip sont généralement brefs, ils sont donc nombreux. Un clip dure en moyenne 3 minutes et comporte plus ou moins 50 plans, soit 3 à 4 secondes par plan seulement. Les manipulations d'images (effets de lumière, mouvements de caméra, transformation de l’image, montage) sont données à voir dans le clip alors que le cinéma occultait ces procédés par souci de « réalisme » et pour ne pas brouiller la trame narrative. Ici, la technologie sert à produire des images et non plus seulement à les reproduire. Les superpositions, incrustations, décompositions et déformations d'images interrogent les rapports de l’image vidéo à la reproduction du réel : l’image existe pour elle-même.
Le Son contre l'Image ? Le cinéma classique utilisait la musique pour situer un décor, une ambiance. C'est l'"esthétique de la décalcomanie" (à scène gaie, musique gaie; à scène triste, musique triste). Dans le vidéo clip, la musique impose aux images sa Temporalité (mouvement, vitesse de défilement, temps d’apparition, etc.), son rapport au contenu (narratif, syncopé, ambiance). Le son contre l'image ? Certains artistes remarquent dans le rapport image/son le risque d’assujettissement de l’image au son. Gilles Deleuze écrivait dans "L'image-Temps : [L]e visuel et le sonore ne reconstituent pas un tout, mais entrent dans un rapport irrationnel suivant deux trajectoires dissymétriques. L'image audio-visuelle n'est pas un tout, c'est une fusion de la déchirure " Dans « La Vérité des images » de Win Wenders, une conversation avec Jean Luc Godard est transcrite : "Assis à la table de montage, dit Godard, je commence par visionner les images sans le son. Puis je fais passer le son sans les images. C'est seulement ensuite que je mets les deux ensembles comme ils ont été tournés. J'ai parfois le sentiment que quelque chose ne va pas dans une scène - peut-être irait-elle avec un autre son. Alors je remplace un dialogue par des aboiements, par exemple. Ou j'essaye avec une sonate". L'art du clip est devenu un des porte-paroles d'une interrogation sur le langage vidéo dont s’inspire la vidéo d'art (joseph Kupul, Mirrorman, Sukaoff,.....) mais aussi le cinéma (« Blair Witch Project»)
L'exposition Crime et châtiment envisage
une période d'environ deux siècles : de 1791, lorsque Le Peletier de
Saint-Fargeau réclame la suppression de la peine de mort, jusqu'au 30 septembre
1981, date du vote de son abolition en France. Durant toutes ces années, la
littérature a créé d'innombrables personnages de criminels. Le titre de
l'exposition est lui-même emprunté à Dostoïevski. Dans la presse, notamment
dans les quotidiens illustrés, le crime de sang décuple par la fiction du
romanesque sa puissance fantasmatique.
Dans le même temps, le thème criminel investit les arts visuels. Chez les plus
grands peintres, Goya, Géricault, Picasso ou Magritte, les représentations du
crime ou de la peine capitale sont à l'origine d'œuvres saisissantes. Le cinéma
également assimile sans tarder les charmes troubles d'une violence extrême, sa
représentation la transformant même en plaisir, voire en volupté.
C'est encore à la fin du XIXe que naît et se développe une approche du
tempérament délinquant qui se veut scientifique. On cherche à démontrer que les
constantes du criminel s'inscriraient dans sa physiologie même. De telles
théories ont une influence considérable sur la peinture, la sculpture ou la
photographie (Bertillon). Enfin, à la violence du crime répond celle du châtiment :
comment ne pas rappeler l'omniprésence des motifs du gibet, du garrot, de la
guillotine ou de la chaise électrique ?
Au-delà du crime, il s'agit de poser encore et toujours le problème du Mal, et
au-delà de la circonstance sociale, l'inquiétude métaphysique. A ces questions,
l'art apporte un témoignage spectaculaire. Esthétique de la violence, violence
de l'esthétique, cette exposition ne saurait que les réconcilier en rapprochant
des images de toutes sortes, littérature et musique.
Invité de Monumenta 2010 au Grand Palais -
Paris, Christian Boltanski présente au Grand-Palais une installation
spectaculaire « Personnes », tandis qu'au Mac/Val - Vitry il
confronte le visiteur, parfois avec humour, au labyrinthe de la mort
« Après ». Depuis
plus d'une trentaine d'années, BOLTANSKI compose des installations (réalisées à
l'aide de boîtes, de photographies, d'objets perdus ou trouvés, de vêtements)
qui apparaissent comme autant de mises en scène de notre histoire. Une histoire
où plane l'ombre de la Shoah, des massacres de masse mais aussi, dit-il, celle
du «doigt de Dieu», ce doigt qui, au hasard, fait tourner la grande roue de la
vie.
"Les
crimes de masse ont pour moi une importance particulière. Quand on voit des
morts après une émeute ou un massacre, on voit toujours des vêtements. Le
vêtement est lié au meurtre de masse mais pas seulement à cela. Comme dit Milan
Kundera, il faut que les vieux morts laissent la place aux jeunes morts."
Comment
définissez-vous votre travail ?
"Je
dirais que mon activité consiste à poser des questions par l'intermédiaire de
moyens visuels ou par des sensations. Il existe deux types d'art : celui qui
parle de l'art lui-même, de son fonctionnement. Et il y a celui qui parle de la
vie. Moi, je suis de ce côté-là."
Quel
rôle pour les artistes et les habitants dans la fabrique de la ville ?
Telle
est la question que pose la thématique de l’événement SmartCity organisé en
janvier 2010. Comment associer le regard sensible et critique des artistes,
ainsi que la connaissance des habitants et usagers à la conception des projets
urbains ? La création artistique peut-elle contribuer à la construction d’une
nouvelle urbanité ? Au travers d’expérimentations territorialisées, de
présentation de projets innovants et de débats, l’événement SmartCity met en
perspective ces questions et invite à la recherche collaborative d’espaces
urbains plus habitables.
Suivez
l'actualité de l'événement avec le blog SmartCity
Cette
question en apparence provocatrice peut sembler n’être qu’une des nombreuses
railleries auxquelles nous ont habitué les adeptes de Marcel Duchamp. En fait,
dans une société industrielle quelles fonctions remplies l’art ?
L''art
est "inutile", signifie seulement que ni la peinture ni la musique ne
concourent à combler des besoins naturels ou instrumentaux. On ne peut pas se
nourrir avec des tableaux, on ne peut pas se vêtir avec de la musique, ...
C'est peut-être dommage, mais c'est ainsi ! Pourquoi
ne pas finalement considérer l'inutilité positivement ? N'avons-nous pas, paradoxalement, besoin de
ce dont nous n'avons nul besoin ? Autrement dit : la valeur de l'art ne
réside-t-elle pas justement, dans cette inutilité, d'abord "dénoncée"
?
L'art
est-il utile ? Oui. Pourquoi ? Parce qu'il est l'art." disait Baudelaire.
Si
nous penchons en faveur de cette idée, nous pourrions nous inspirer des
analyses du jugement esthétique de Kant : L'idée
d'une "finalité sans [considération de la] fin". L'inutilité
"matérielle" de l'art est-elle la condition de son utilité
"spirituelle" ?
Nous
pourrions en douter lorsque nous constatons son utilité "financière"
par les sommes versées pour acquérir certaines œuvres ou les campagnes médiatiques pour promouvoir un artiste "incontournable".
"La
beauté n'est pas une qualité inhérente aux choses, elle existe seulement dans
l'esprit qui la contemple et chaque esprit perçoit une beauté différente"
KANT
Dés
son apparition, attestée au XIIIème siècle dans la langue française, le mot
"gout" associe à la fois les plaisirs de la table et ceux de
l'esprit. Ce lien entre l'univers gustatif et le monde de l'esthétique sera
réaffirmé à de nombreuses reprises. Dans "l'Encyclopédie" de Diderot
et d'Alembert à la fin du 18ème siècle, à l'article "gout" le
philosophe Louis De Jeaucourt parle "du sens admirable par lequel on
discerne les saveurs" et il explique que cette distinction n'est pas innée
et s'acquiert avec le temps et le travail, qu'elle est forcément subjective et
que l'imagination y joue un grand rôle. Voltaire prolonge cette définition par
une réflexion esthétique : "le gout a aussi à faire avec le plaisir
intellectuel et qu'il y a la même connivence entre le plaisir d'un banquet et
la contemplation d'un tableau". Ce qui est mis en relation dans cette
équivalence, c'est la dimension de sociabilité du gout et sa capacité à définir
un groupe humain. Cette idée forte se retrouve au 20ème siècle dans les
recherches sociologiques de Pierre Bourdieu quand il pose le concept de
distinction : Dis-moi ce que tu choisis et aimes et je te dirai qui tu es, à
quelle couche sociale tu appartiens et quelles seront tes valeurs idéologiques.
"L'art
doit envoyer valser le bon et le mauvais gout" Marcel DUCHAMP
Les
normes du gout d'une époque ne sont pas figées et l'un des buts de l'art est
devenu de tester, déplacer ces normes. Mais le "vrai" gout en
définitive est celui qu'impose le public en adhérant ou en rejetant les
nouveautés artistiques. Les accumulations et sérigraphies de bouteilles de Coca
Cola d'Andy Warhol ont été adoptées par le public et la machine
"Cloaca" de Wim Delvoye suscite la curiosité des visiteurs, l'intérêt des investisseurs et la demande des institutions culturelles.
Takashi
Murakami est une figure majeure du "néo pop-art" japonais, il est le
reflet de la culture consommatrice japonaise et du phénomène Otaku. Son œuvre
immergée dans l'univers des manga et des jeux vidéos, à première vu ludique,
porte également un regard critique sur la société et la créativité japonaise
contemporaine en incarnant la nouvelle création artistique au Japon dans son
exubérance et sa fantaisie.
Comme
le pop-art dans les années 60, l'art contemporain nippon se nourrit de la
culture populaire: c'est le manga-art. En digne successeur de Andy Warhol,
Takashi Murakami, qui a passé la quarantaine, se nourrit des nouveaux standards
visuels et la situation de la culture japonaise, entre tradition et référence
occidentale, technologie et consommation. s'abreuvant de la mode Kawaii et
autres kitty il recrée la pop art à sa manière en utilisant des motifs simples
tels des champignons puis des yeux qui deviennent des motifs a part entière,
imprimés à l'infini et de manière répétitive sur une surface, ils ont alors la
densité d'un motif de camouflage, comme celui que déclinait Andy Warhol dans
les années 1980.
Takashi
Murakami :"
Au départ, mon œuvre a subi la double influence de Warhol et de Disney. Prenez
mon personnage de Mr DOB par exemple. C’est une sorte de clone de Mickey. Un
Mickey sous l'emprise d'un virus mutant. je le décline comme Warhol l'a fait
avec ses portraits de Marilyn. Toutes mes premières icônes sont chargées du
contexte politique et écologique de ces années 70. ""
Je tente d'expérimenter dans mon œuvre les délires visuels psychédéliques et
d'approcher les frontières de la folie comme du rêve. C'est pour ça que
j'emploie des motifs répétés et de dessins aux couleurs vives. "
Les
traits associés à la laideur dessinent en creux les critères de la beauté que
l’on assimile souvent à un corps jeune, symétrique, lisse, droit, mince, grand.
Reste à savoir si ces canons sont universels. La question oppose deux camps.
Pour les historiens comme Georges Vigarello, «rien de plus culturel que la
beauté physique ». La peinture fournit des preuves évidentes de la relativité
des canons de beauté selon les époques. Il suffit de voir comment l’on a peint
les Trois Grâces au fil du temps. La littérature fournit aussi un précieux
témoignage: Ronsart vante la «divine corpulence» de sa belle; Alexandre Dumas s’extasie
sur les charmes d’une amoureuse « hardie de poitrine et cambrée de hanches».
Les
anthropologues ont de nombreux arguments montrant la relativité des critères
selon les sociétés. Les femmes mursi appelées «négresses à plateau» n’ont rien
pour charmer le regard des Occidentaux; les pieds de certaines Chinoises,
atrophiés par des bandages, avaient, paraît-il, leur charme au regard des
hommes; les vénus hottentotes arborent des fessiers hypertrophiés très prisés
des Bushmen, etc.
Mais
au-delà des variations historiques et sociales, n’existerait-il pas tout de
même des critères de beauté universels? C’est ce que pensent beaucoup de
psychologues adeptes de l’approche évolutionniste. Leurs arguments? Depuis une
vingtaine d’années, de très nombreuses expériences ont été menées sur les
critères de « physical attractiveness ». La méthode la plus courante
consiste à proposer à des personnes de comparer deux portraits pour choisir le
plus attirant. Il est même possible de modifier les paramètres d’un visage par
ordinateur pour voir comment telle ou telle modification opère. Plus ou moins
rond, plus ou moins jeune…, à ce jeu, des constantes se dégagent nettement.
Tout
d’abord, il apparaît que les traits «néoténiques» d’un visage (petit nez et
grand yeux) sont plus attractifs que d’autres, ce qui disqualifie les visages
âgés aux traits complexes. On préférera les traits «enfantins». Les traits de
la vieillesse : rides, teint de la peau, tâches sont discrédités. Inversement,
la maturité de certains traits peut s’avérer plus attrayante. On préfère en
général les visages sans bajoues et aux pommettes saillantes. Une autre
caractéristique est la symétrie. Un visage globalement symétrique est jugé plus
beau. Enfin, la forme moyenne de l’ovale fait référence en matière de beauté.
Un visage «normal» n’est ni rond ni carré.
Tout
bien considéré, l’opposition entre universalité et relativité de la beauté n’a
rien d’irréductible. Regardons les nus féminins que nous offrent la peinture,
la photographie, la mode. Ils peuvent présenter des femmes plus ou moins
rondes, celles-ci sont jeunes. De même les hommes, de l’éphèbe grec à l’homme
mûr de la Renaissance. Leurs proportions harmonieuses affichent bonne santé et
vigueur. Ni les freluquets, ni les obèses ne sont jamais pris comme étalons de
beauté. Voilà pourquoi les garçons savent d’instinct qu’en rentrant le ventre
et gonflant les pectoraux, ils auront plus de chance de plaire.
L’appréciation
de la beauté varie bien selon les époques et les cultures. Mais cette variation
se fait autour de quelques attracteurs esthétiques. Jamais l’on ne verra des
dents mal plantées, des boutons sur le visage, une grimace, des rides, des
tâches comme canons de beauté. Il y a peu de chance pour que quelque part dans
le monde les gens préfèrent le portrait du personnage de Frankestein à celui de
George Clooney.
Créé en 2001, Pleix est un
collectif de sept artistes parisiens, — infographistes, graphistes musiciens —
alternant réalisation de travaux alimentaires tels que des clips vidéos et des
publicités avec une recherche esthétique et plastique personnelle. Leur univers
emprunte au jeu vidéo, au cinéma, à la musique électronique, mais aussi au
design graphique et aux arts plastiques. Pleix réutilise les moyens et codes
visuels de la publicité, en les exagérant volontairement afin de mieux les
détourner et dénoncer, avec un humour qui leur est propre, la chosification et
la deshumanisation de l'individu par la société de consommation. Dans Pride's
Paranoïa, le personnage principal se transforme peu à peu en machine -- les
différents objets des vitrines et supermarché de Future City s'agglutinant
autour de lui comme s'il était aimanté --, caricature féroce du consommateur
«terriblement fier», désirant se défaire de son «complexe de superhéros» en
achetant compulsivement, et qui ne «peut pas dormir tant que ça n'est pas
fait». De la même façon, les personnages du clip Itsu, réalisé pour le groupe
Plaid, se transforment petit à petit en psychopathes sur fond de diagrammes des
bénéfices de l'entreprise dont ils font partie. L'empreinte de Pleix pourrait
également être un travail commun sur les limites, les contradictions, les
accidents qui montrent ces états d'incertitude, de fragilité inhérents au monde
numérique.
Best-seller
au Japon, cet essai du philosophe japonais Hiroki AZUMA a le mérite de prendre
au sérieux le phénomène 'Otaku', nom donné à ces jeunes (et parfois moins
jeunes) fans de mangas, de jeux vidéos et de dessins animés, qui ne vivent
qu'entre eux et avec comme passion exclusive ces produits culturels dont ils ne
cessent de produire et consommer les produits dérivés (figurines, fanzines,
romans tirés de dessins animés, dessins animés tirés d'un personnage de manga,
etc .). Véritables acteurs d'un phénomène en perpétuelle croissance depuis les
années 1980, qui touche une frange significative de la jeunesse japonaise, leur
'mouvement' a créé un gigantesque marché et gagne aujourd'hui toutes les
jeunesses occidentales, via le succès mondial du manga. Ce succès n'est-il pas le
signe que la culture Otaku touche à quelque chose de profond de l'évolution de
nos sociétés ? En analysant sans les juger les produits qui façonnent cette
culture, Hiroki Azuma décèle, en s'appuyant sur les apports de la philosophie
française (Lyotard, Baudrillard...), certaines des grandes caractéristiques de
la postmodernité (perte des repères, des Grands Récits, de la frontière entre
l'original et la copie, entre auteur et consommateur, création en réseau, etc.
.). Parallèlement,
il observe dans notre postmodernité les raisons profondes du succès grandissant
de cette culture Otaku.
CORPS
OTAKU
Les
"otakus" sont intéressants dans leurs rapports au corps car ils
impliquent un mode de vie avec des règles, normes et modèles qui façonnent
l’apparence et leurs comportements corporelles (phénomène de « cosplay » =
ressembler à ses héros). Leur
consommation a une tournure obsessionnelle, cela est à rapprocher de ce que dit
Michel De Certeau, parlant de la consommation traditionnelle, qu'elle est une
manière de faire CORPS avec un produit. Le
corps devient imaginaire car immergé dans un univers de modèles otaku véhiculés
par Internet, les mangas, les médias et les revues. En d'autres termes, le
"otaku" tente de se réincarner dans son désir.