BEAUTE et GOUT -
"La
beauté n'est pas une qualité inhérente aux choses, elle existe seulement dans
l'esprit qui la contemple et chaque esprit perçoit une beauté différente"
KANT
Dés
son apparition, attestée au XIIIème siècle dans la langue française, le mot
"gout" associe à la fois les plaisirs de la table et ceux de
l'esprit. Ce lien entre l'univers gustatif et le monde de l'esthétique sera
réaffirmé à de nombreuses reprises. Dans "l'Encyclopédie" de Diderot
et d'Alembert à la fin du 18ème siècle, à l'article "gout" le
philosophe Louis De Jeaucourt parle "du sens admirable par lequel on
discerne les saveurs" et il explique que cette distinction n'est pas innée
et s'acquiert avec le temps et le travail, qu'elle est forcément subjective et
que l'imagination y joue un grand rôle. Voltaire prolonge cette définition par
une réflexion esthétique : "le gout a aussi à faire avec le plaisir
intellectuel et qu'il y a la même connivence entre le plaisir d'un banquet et
la contemplation d'un tableau". Ce qui est mis en relation dans cette
équivalence, c'est la dimension de sociabilité du gout et sa capacité à définir
un groupe humain. Cette idée forte se retrouve au 20ème siècle dans les
recherches sociologiques de Pierre Bourdieu quand il pose le concept de
distinction : Dis-moi ce que tu choisis et aimes et je te dirai qui tu es, à
quelle couche sociale tu appartiens et quelles seront tes valeurs idéologiques.
"L'art
doit envoyer valser le bon et le mauvais gout" Marcel DUCHAMP
Les normes du gout d'une époque ne sont pas figées et l'un des buts de l'art est devenu de tester, déplacer ces normes. Mais le "vrai" gout en définitive est celui qu'impose le public en adhérant ou en rejetant les nouveautés artistiques. Les accumulations et sérigraphies de bouteilles de Coca Cola d'Andy Warhol ont été adoptées par le public et la machine "Cloaca" de Wim Delvoye suscite la curiosité des visiteurs, l'intérêt des investisseurs et la demande des institutions culturelles.